Lotissement / Prix Impatience 2016 / Télérama

Prix du jury, Lotissement, de Frédéric Vossier, aura séduit par sa radicalité, sa grâce froide, son juste emploi de la vidéo. On pourrait se croire dans un long métrage de Lars von Trier obéissant à ses fameux dogmes de mise en scène ultra dépouillée. Un CRS à la retraite vient d’installer, dans l’appartement où il vit avec son fils célibataire et solitaire, une très sensuelle jeune femme dont il s’est épris. À travers un espace de lignes blanches, d’angles tranchants sous des lumières crues, le trio va s’observer, se recomposer d’insaisissable manière. Sans que les mots apportent des éclaircissements. Tommy Milliot dirige admirablement les trois comédiens (Eye Haidara et Miglen Mirtchev, notamment, troublants parce que trop vrais) et réussit à faire de son décor abstrait une arène magique où l’on observe des personnages se débattre dans ce qu’ils parviennent à peine à nommer : amour, peur, désir, mort ? La force de Lotissement tient à ce pouvoir de déclencher l’imaginaire avec presque rien. Le spectateur est peu à peu au milieu de ces deux hommes et de cette femme, réinvente les objets de l’appartement, met des mots sur les silences…

— Télérama, La chronique de Fabienne Pascaud, juin 2016 -